RFI - Article publié le : mercredi 21 août 2013 à 14:17 -
Dernière modification le : mercredi 21 août 2013 à 14:34
Une
affiche accrochée à une poussette, lors d'une manifestation
pro-islamiste à Istanbul, montre le Premier ministre turc Erdogan en
compagnie de l'ex-président égyptien Mohammed Morsi, le 1er juillet
2013.
REUTERS/Murad Sezer
La Turquie, dont le Parti de la justice et du développement
au pouvoir est très proche des Frères musulmans égyptiens, continue de
suivre de près la situation en Egypte. D'autant que plusieurs
ressortissants turcs ont été arrêtés ces derniers jours au Caire et à
Louxor, parmi lesquels un journaliste dont la garde à vue vient d'être
prolongée d'une quinzaine de jours. Ankara continue de dénoncer
- parfois avec virulence - le coup d'Etat dont a été victime le
président Morsi, ainsi que la répression de la confrérie.
Avec notre correspondant à Istanbul, Jérôme Bastion
Le Premier ministre turc a encore eu des mots très durs, hier, mardi
20 août, pour commenter la situation en Egypte : en effet, Recep Tayyip
Erdogan n’arrive toujours pas à digérer que son ami Morsi ait été déposé
comme un malpropre et placé en détention. Il n’a de cesse de dénoncer
le coup d’Etat des militaires égyptiens - d’autant que lui-même a très
peur de subir un jour le même sort de la part de sa propre armée - mais
aussi et surtout le « complot international » censé se trouver derrière ce putsch.
M. Erdogan s’était, dans un premier temps, attaché à provoquer une
condamnation voire une intervention de la communauté internationale
contre la suspension de la légalité constitutionnelle en Egypte ; il
avait d'ailleurs accusé les pays occidentaux notamment de « complicité coupable »
en raison de leur réaction timorée. Mais depuis mardi, il est certain
d’avoir trouvé le vrai coupable, le vrai commanditaire du coup d’Etat,
qui serait selon lui, Israël. M. Erdogan affirme même détenir les
preuves de ce complot monté par « un intellectuel français de confession israélite », pour - c’est son leitmotiv - priver les islamistes de leur victoire électorale.
Relations tendues
Le président de la République Abdullah Gül est lui, plus mesuré : il
appelle à la fin des violences et de la répression et à des élections
rapides et transparentes en Egypte. Les relations entre les deux
capitales sont donc très tendues puisque les deux pays ont rappelé leurs
ambassadeurs mutuels, après que le pouvoir intérimaire au Caire a
accusé M. Erdogan de s’immiscer dans les affaires intérieures
égyptiennes à force de dénoncer l'illégalité des nouveaux dirigeants
égyptiens.
En Turquie, les manifestations islamistes, pro-Morsi, étaient
nombreuses et relativement importantes lors des assauts policiers contre
les occupants des places du Caire, mais leur rythme a considérablement
baissé désormais. Il y a bien des « veilleurs de la démocratie
égyptienne », défenseurs des Frères musulmans donc, qui campent depuis
le week-end dernier devant une mosquée d’Istanbul, ils viennent de
prolonger leur mouvement d’une semaine, mais la mobilisation reste
limitée à ce modeste exemple. Il est probable qu’à une occasion ou à une
autre, de nouvelles manifestations aient lieu, notamment après la
grande prière du vendredi, mais cela ne concerne qu’une petite minorité
malgré tout, même si la population critique d’une manière générale sans
ambages le coup d’Etat du général al-Sissi.
Opposition embarrassée
Autre manifestation de solidarité, les ministres du gouvernement
Erdogan profitent parfois de leurs apparitions publiques pour faire le
signe rabia avec les quatre doigts de la main écartée en signe
de solidarité. Le maire d’Istanbul a d'ailleurs promis de baptiser une
des places de la ville du nom de Rabia justement, mais cela ne va guère au-delà de ce soutien symbolique.
Enfin, l'opposition paraît embarrassée et reste quasiment muette sur
la question, au-delà de la condamnation de principe au moment où la
démocratie a été suspendue en Egypte, début juillet. On sent bien en
effet, comme l’écrivent souvent les éditorialistes, qu’une dénonciation
trop forte des militaires passerait pour un soutien au gouvernement AKP
de M. Erdogan, dont la politique est tout de même fortement contestée
par les laïcs notamment depuis les manifestations de Gezi, en juin. Les
manifestants de Gezi, justement, qui soutenaient les manifestants
anti-Morsi du Caire n’affichent plus la même solidarité avec les
opposants égyptiens au pouvoir islamiste alors en place au Caire, et
observent un silence gêné. L’opposition et les intellectuels sont donc
un peu pris entre deux feux, avec d’un côté le désir de défendre les
principes démocratiques universels, et, de l’autre, celui de ne pas
apparaître comme soutenant les islamistes, et donc par ricochet M.
Erdogan.
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